JEN n° 38 : Le Tombeau......
LE TOMBEAU PERDU DE JESUS
Des chercheurs de l'Institut d'études sémitiques du Collège de France se sont penchés sur les inscriptions des ossuaires de Talpiot, en Israël, censés renfermer les restes de la famille de Jésus…
" Et si, après tout, Marie-Madeleine était un homme ? " lance Arnaud Sérandour, chercheur à l'Institut d'études sémitiques du Collège de France. Ce n'est qu'à moitié une boutade : " avec mon collègue Pierre Bordreuil, nous avons relu le rapport de fouilles publié en 1996. Celui-ci donnait le détail de toutes les inscriptions des ossuaires découverts en 1980 dans la fameuse tombe de Talpiot, à Jérusalem, qui sont citées dans le documentaire canadien sur la soi-disant " tombe perdue de Jésus ".
Et bien, nous pensons que le nom que les cinéastes attribuent à Marie-Madeleine pourrait être un nom masculin… "
La tombe de Talpiot, fouillée par une équipe d'archéologues israéliens, renfermait une dizaine d'ossuaires dont six portaient des noms. Les archéologues ont identifié à l'époque le nom de " Jésus, fils de Joseph " en araméen sur l'un de ces ossuaires ; le nom de " Maria " en hébreu sur un autre ; de " Matthieu ", de " Yose " toujours en hébreu ; de " Judas, fils de Jésus " en araméen et de " Mariamênou e Mara " Ce dernier nom, explique Arnaud Sérandour, Mariamênou pourrait être un génitif masculin de Marimênos, nom non attesté au masculin. De même que le terme araméen " Mara " qui suit est au masculin et veut dire " seigneur "…
Cette hypothèse n'est cependant pas celle de Levi Yizhaq Rahmani, qui a recensé et compilé dans un catalogue qui fait référence, tous les noms découverts sur les ossuaires juifs des collections de l'Etat d'Israël. " Selon ce dernier, reprend le chercheur, Mariamênou serait le génitif d'une forme neutre Mariamênon, elle même étant un diminutif de Mariamênê, l'une des variantes de Mariam, Mariamê. Ce glissement s'expliquerait un peu de la même façon qu'en français " Marion ", dont la terminaison sonne comme un nom masculin, et qui est pourtant un diminutif de " Marianne " ou " Marie ", des prénoms féminins. Le professeur Rahmani suppose également que " Mara " serait la version abrégée du mot " Martha " qui signifie " dame " et qu'il a déjà rencontré sur une autre inscription. "
A moins, troisième hypothèse soulevée par un autre épigraphiste , le Dr Stephen Pfann- spécialiste des inscriptions grecques -, que cette inscription renvoie à deux noms de deux femmes différentes qui aient été placées dans le même ossuaire, ce qui était chose courante.
Autrement dit, il est bien difficile de préciser qui a été placé dans cet ossuaire…
Mais comment les auteurs du documentaire, qui ont suivi l'hypothèse de Rahmani, sont-ils arrivés jusqu'à Marie-Madeleine? " En collant ensemble des éléments disparates ! soupire Arnaud Sérandour. Ils ont découvert que ce nom de Mariamênê, qui n'est jamais cité dans les Evangiles, apparaît dans les Actes de Philippe où il est traduit par Marianne. "
Les Actes de Philippe sont un texte apocryphe - c'est-à-dire qui n'a pas été retenu dans le canon biblique - rédigé en grec au plus tôt pendant la seconde moitié du IVe siècle. Une Mariamênê y figure en effet, parmi les disciples de Jésus. " Mais si nous lisons attentivement ce texte, nous nous apercevons que cette Mariamênê, sœur de Philippe, ne correspond à aucune des Marie des Evangiles qui ont été à l'origine de la figure de Marie-Madeleine, selon
Arnaud Sérandour soulève enfin une autre association bizarre : " Même si la tombe enferme des ossuaires d'une même famille et même si le grec était parlé en Judée à cette époque, rien n'indique que Mariamênon, dont le nom est grec, soit la mère de ce " Judas, fils de Jésus ", dont l'ossuaire est gravé en araméen. " Les tombes collectives qui connaissent une occupation longue - un siècle pour celle-ci subissent en effet souvent des remaniements et des changements de groupes familiaux dont nous avons perdu toute trace.
Le professeur Amos Kloner a supervisé l'étude archéologique de la tombe de Talpiot, découverte durant un chantier de construction en 1980 et a publié en 1996 le rapport de fouille. Il a été interrogé le 27 février dernier sur Jerusalem Post Online, en réaction aux , affirmations de James Cameron, concernant l'attribution de cette tombe à la famille de Jésus.
Jerusalem Post : Que pensez - vous de l'affirmation selon laquelle Jésus et sa famille ont été enterrés dans cette tombe ?
Amos Kloner : C'est une belle histoire pour un téléfilm ! Mais c'est totalement impossible. C'est absurde. Ce n'est pas vraisemblable que Jésus et sa famille aient une tombe familiale. Ils constituaient une famille galiléenne, sans liens avec Jérusalem. La tombe de Talpiot appartient à une famille de la classe moyenne du 1er siècle de notre ère.
Jerusalem Post : Mais il semble y avoir une telle conjonction de noms…
Amos Kloner : L'inscription " Jésus fils de Joseph " a été découverte sur trois ou quatre ossuaires. Ce sont des noms très courants. Il y a eu, dans les années 1940, des gros titres dans la presse à propos d'un autre ossuaire au nom de Jésus, qui était donné comme la première preuve matérielle du christianisme. Il s'agissait d'une autre tombe de Jésus. Quelques mois plus tard, cela fut réfuté. Donnez-moi une preuve scientifique et je serai accroché ! Mais tout ceci est fabriqué.
Jerusalem Post : Que pensez - vous de l'affirmation que selon laquelle le dixième ossuaire de cette tombe, qui a disparu, pourrait être celui gravé au nom de " Jacques frère de Jésus " (qui a défrayé la chronique en 2002 avant d'être déclaré l'œuvre d'un faussaire, NdT) ?
Amos Kloner : Rien n'a disparu. Le dixième ossuaire était sur mon inventaire. Les mesures ne sont pas les mêmes que celles de l'ossuaire de Jacques. Et il était sans inscription. Nous manquons de place dans nos réserves, aussi, parfois ceux qui ne sont pas gravés sont exposés dans la cours du musée Rockefeller.
Jerusalem Post : Pourquoi, alors que vous réfutez ces interprétations, les Antiquités israéliennes ( IAA, autorité scientifique et administrative sous laquelle a eu lieu cette fouille comme la plupart en Israël NdT) ont-elles prêté les ossuaires aux cinéastes ?
Amos Kloner : Comment l'IAA s'organise n'est pas mon problème. Je ne travaille plus pour eux. Mais leur attitude est totalement insensée : la main gauche ignore ce que fait la droite.